Qu’on reconnaisse que Les misérables est l’une des plus grandes comédies musicales au monde. Je l’ai vu sur scène à New York et à Londres et au cinéma, j’ai écouté l’album en boucle, et à chaque fois le spectacle est une révélation. Avec sa partition émouvante, son histoire époustouflante et ses paroles incomparables, Les Mis est incontournable. Et heureusement, la production maintenant campée à l’Opéra du Kennedy Center contient tous les centime de sa magnificence.
En regardant cette production, je me suis émerveillé de la qualité picturale des images de la scène et de la cinématique de la scène, avec des arrière-plans en clair-obscur en mouvement sur des canevas et des ensembles costumés et éclairés comme Rembrandt rencontre Bruegel. J’ai été ravi par les voix sonores et l’orchestre alors qu’ils se fondaient sublimement dans de riches sensations chorales déclenchées par des solos doux et envolés. J’ai été touché par les performances des acteurs qui se sentaient retrouvées dans l’instant. Même la vaste intimité et la chorégraphie de combat semblaient dansantes.
Il y a tellement de choses à louer à propos de cette œuvre, notamment les créateurs derrière elle, à commencer par le roman de Victor Hugo, la musique de Claude-Michel Schönberg, les paroles de Herbert Kretzmer (voir le générique complet ici — la compagnie de tournée dirigée par Laurence Connor et James Powell n’a pas de maillon faible). Il n’y a pas de fin de choses saillantes à dire sur la résonance et l’exécution de l’œuvre. Mais l’autre soir, un thème particulier m’a sauté aux yeux : Bien que l’histoire se déroule dans la France du XIXe siècle et croise une révolution historique dans les rues de Paris – Le deuxième acte commence de manière spectaculaire aux barricades – au cœur de la comédie musicale, j’ai réalisé , est un intérieur révolution : l’arc épique de la rédemption de Jean Valjean.
Le prologue établit que Valjean est libéré de 19 ans de travaux forcés pour avoir volé une miche de pain. Peu importe qu’il s’agisse d’un acte de charité (le pain devait nourrir l’enfant de sa sœur), Valjean réintègre la vie civile condamnée par la loi. Et le désagréable inspecteur Javert, en tant qu’agent d’une justice autoritaire, n’est pas près de laisser Valjean l’oublier.
L’histoire prend alors une tournure étonnante. Valjean, maintenant un ex-détenu sans le sou, est surpris en train de voler des chandeliers en argent sur un autel d’église et est sur le point d’être renvoyé en prison. Mais l’évêque fait une intervention divine : il assure à l’officier qui l’arrête que l’argent est son cadeau à Valjean. Par la grâce de cet évêque (qui dirait que c’était la grâce de Dieu), Valjean est libre de partir. (« Reposez-vous de la douleur et reposez-vous du mal », lui chante l’évêque.)
Ainsi s’introduit dramatiquement l’antique tension entre culpabilité et pardon, entre châtiment et miséricorde. Et la façon dont Valjean choisit maintenant d’agir en sachant ce qui est en jeu pour lui en tant qu’être moral est ce qui propulse une grande partie du reste de l’intrigue de la comédie musicale.
Avec le temps, Valjean assume une nouvelle identité; il change de nom et devient propriétaire d’usine et maire, et on le voit faire une série de bonnes œuvres. Il sauve une jeune femme démunie nommée Fantine, promet de s’occuper de sa fille lorsqu’elle sera mourante (« Bon m’sieur, vous venez de Dieu du ciel », lui chante Fantine). Puis il sauve un villageois écrasé sous une charrette (« Monsieur le Maire, vous venez de Dieu ! Vous êtes un saint ! » lui chante le villageois).
Mais Valjean ressent un sentiment d’indignité dont il ne peut se débarrasser. « Les hommes comme vous ne peuvent jamais changer », le nargue Javert dans une confrontation combative.
« Qui suis je? » est l’auto-interrogation chantée de Valjean et est un lyrique récurrent, notamment à un moment fort où Valjean apprend qu’un homme innocent qui lui ressemble va être envoyé en prison pour quelque chose que Valjean a fait. La scène dans laquelle Valjean se débat avec ce qu’il faut faire est captivante, et les paroles pleines de conscience sont à la hauteur de « Être ou ne pas être » de Hamlet :
Qui suis je?
Puis-je condamner cet homme à l’esclavage ?
Prétendre que je ne ressens pas son agonie ?
Cet innocent qui porte mon visage,
Qui va juger à ma place…
Qui suis je?Puis-je me cacher pour toujours plus?
Prétendre que je ne suis plus l’homme que j’étais avant ?
Et doit mon nom jusqu’à ma mort
N’être qu’un alibi ?Dois-je mentir ?
Comment puis-je jamais faire face à mes semblables?
Comment puis-je encore me faire face ?Mon âme appartient à Dieu, je le sais,
J’ai conclu ce marché il y a longtemps.
Il m’a donné de l’espoir quand l’espoir était parti!
Il m’a donné la force de continuer !
Qui suis je?
A ce moment de la mise en scène, Valjean fait irruption dans la salle d’audience et se déclare :
Qui suis je?
Je suis Jean Valjean !
Il y a beaucoup de scènes puissantes dans Les Mis, mais pour moi, celui-ci se démarque parce qu’il capture avec le plus d’éloquence ce que la forme d’art du théâtre peut nous dire de manière unique sur la façon dont nous sommes dans l’éthique de nos actes. Et la révolution intérieure de Jean Valjean — son « Qui suis-je ? arc de caractère à la recherche de l’individualité morale – est l’une des principales raisons pour lesquelles cette comédie musicale est si durable et pourquoi il est essentiel de la voir.
Durée : Environ 2h45, dont un entracte.
Les misérables joue jusqu’au 29 avril 2023 à l’Opéra du John F. Kennedy Center for the Performing Arts, 2700 F Street NW, Washington, DC. Les billets (69 $ à 225 $) sont disponibles à la billetterie, en ligne, ou en appelant le (202) 467-4600 ou le (800) 444-1324.
Le programme pour Les misérables est en ligne ici.
Sécurité COVID : Les masques sont facultatifs dans tous les espaces du Kennedy Center pour les visiteurs et le personnel. Si vous préférez porter un masque, vous pouvez le faire. Voir le plan de sécurité COVID complet du Kennedy Center ici.