Dans 'Open' au Nu Sass, les tours imaginaires d'un magicien révèlent la réalité

Le théâtre a longtemps été obsédé par les magiciens. Pour une industrie dans le domaine de la création d’œuvres convaincantes, il existe une fascination compréhensible, peut-être même de la jalousie, pour le pouvoir qu’un bon magicien peut avoir sur un public, avec sa capacité à créer un spectacle qui nie ⁠— et permet au public de s’échapper ⁠— réalité.

Il est alors ironique que Ouvrir, un one-woman show sur un magicien, a l’effet inverse. Maintenant en spectacle chez Nu Sass Productions, Ouvrir est un spectacle de magie déchirant léger sur l’évasion et lourd sur la réalité.

Le Magicien au centre de ce spectacle est sans nom, et notamment pas un magicien. Elle est plutôt une femme désespérée de nier la réalité. Pour ce faire, elle s’imagine dans un spectacle de magie et utilise des astuces, bien qu’imaginaires, pour retracer sa relation avec sa petite amie, Jenny, et comprendre comment elle s’est retrouvée dans le moment déchirant dans lequel elle se trouve actuellement. Malgré ses meilleures tentatives, ses souvenirs reviennent sous la forme de voix off. Sa réalité, semble-t-il, est impossible à nier, même si son imagination se déchaîne.

Pour être clair, le fait que tout le spectacle se déroule dans la tête du magicien n’est pas un spoiler. Elle nous le dit dès les premières minutes. Elle nous informe également que nous, le public, sommes également imaginaires, que nous existons dans sa tête pour que le spectacle de magie semble réel. Elle exige des applaudissements lorsqu’elle transforme un œuf imaginaire en perroquet imaginaire, lorsqu’elle jongle avec des balles imaginaires, lorsqu’elle marche sur une corde raide imaginaire. Nous, le public imaginaire, l’encourageons.

Le fait que nous soyons informés très tôt que nous sommes imaginaires crée un lien immédiat entre le public et l’interprète, puisque nous sommes essentiellement dans le spectacle avec elle. Avec le niveau d’intimité chez Nu Sass ⁠— la compagnie se produit dans une petite galerie d’art reconvertie ⁠— cette connexion est encore plus intense.

L’intimité fonctionne aussi bien pour un spectacle comme Ouvrir, qui peut parfois être lourd dans son sujet. Dans un petit espace, où on a souvent l’impression que la magicienne vous parle directement et n’a pas peur de vous regarder dans les yeux, sa sincérité est percutante. Dans un espace plus grand, avec un lien moins direct entre le public et l’interprète, une discussion aussi franche sur ces thèmes pourrait ne pas avoir le même poids qu’ici.

La performance d’Allison McAlister en tant que magicienne est certainement bénéfique à cette fin. Elle fait preuve d’une authenticité impressionnante lorsqu’elle transmet des souvenirs et des émotions plus pénibles.

C’est en fait dans les moments les plus légers de la série que McAllister pourrait être plus intense. Après tout, Ouvrir se déroule dans l’imagination et dans un moment de désespoir, et l’énergie frénétique qui accompagne souvent ces qualités manque ici. Lorsque la magicienne est franche, le désespoir est là, mais lorsqu’elle est dans le déni, elle semble souvent trop ancrée. Parfois, on a moins l’impression que son imagination se déchaîne et plus comme si son imagination avait été soigneusement tracée.

Créer plus de variation dans l’énergie accélérerait également, vraisemblablement, le rythme du spectacle. Sous la direction de Dom Ocampo, Ouvrir n’est en aucun cas trop long ⁠ – le temps d’exécution n’est que d’environ 80 minutes ⁠ – mais il repose plutôt trop sur des vitesses lentes pour transmettre la douleur émotionnelle. La variation transmettrait le large éventail d’émotions associées à un moment comme celui dans lequel se trouve le magicien, et créerait à son tour un arc émotionnel plus convaincant.

Pourtant, à la fin de la journée, le gain qui accompagne le fait de suivre le conflit interne du magicien jusqu’à la fin se concrétise, et quand c’est le cas, il frappe fort. C’est le genre de spectacle où il y a un décalage entre le black-out final et les applaudissements car personne ne veut être celui qui brise la tension.

En fait, il y a aussi une certaine ironie dans cette panne. Souvent, lors d’un spectacle de magie, les applaudissements les plus forts surviennent lorsque le magicien trompe le public, le forçant, au moins pour un moment, à prétendre que la magie est réelle. Dans Ouvrirles applaudissements les plus forts surviennent lorsque le magicien admet que ce n’est pas le cas.

Durée : 80 minutes sans entracte.

Ouvrir joue jusqu’au 27 mai 2023, en rep avec À la recherche de Neil Patrick Harris (jusqu’au 9 juin) et Le complexe Oreo (20 mai au 2 juin) présenté par Nu Sass Productions se produisant à Caos sur F, 923 F Street NW, Washington, DC. Billets, qui peuvent être achetés en ligne, coûtent 30 $, admission générale ; 60 $, soirée rendez-vous (2 billets + 2 boissons + 2 collations); 10 $, industrie/étudiants/travailleurs essentiels/militaires ; et Pay What You Will, toutes les performances, n’importe qui. Les places sont limitées à 30 spectateurs par représentation.

Sécurité COVID : Les masques sont encouragés mais pas obligatoires. Certaines performances nécessitant un masque seront programmées.

Ouvrir
Par Crystal Skillman
Avec Allison McAlister dans le rôle du magicien
Réalisateur : Dom Ocampo
Producteur : Aubri O’Connor
Directrice de production : Ileana Madison
Régisseur : Kristen Geatz Temple
Set : Aubri O’Connor & Ileana Madison
Lumières : Dom Ocampo
Son : Mik Ours
Costumes : Aubri O’Connor et Ileana Madison
Supervision magique : Joe Largess
Images marketing : Mik Ours
Publicité : Laolu Fayese

A lire également